Le révélateur du titre

Voilà que depuis quelque temps, j’avais envie de revoir « The Pervert Guide to Cinema » qui passait il y a quelques années sur Channel 4. J’ai finalement regardé le premier, à nouveau, hier. Et je sais maintenant pourquoi cette envie coïncidait avec les questions relatives à mes travaux récents.
Le lien se résume notamment dans cette phrase de Zizek à propos de « Matrix », qui ouvre le tout premier épisode :

« But the choice between the blue and the red pill is not a choice between illusion and reality. Of course Matrix is a machine for fiction, but these are fictions which already structure our reality. If you take away from our reality the symbolic fictions that regulate it, you loose reality itself…
I want a 3rd pill.
So what is the 3rd pill? Definitely not some kind of transcendental pill which enable a fake fast-food religious experience, but a pill that would enable me to perceive, not the reality behind the illusion but the reality in illusion itself.
If something gets too traumatic, too violent, even too filled with enjoyment, it shatters the coordinate of our reality, we have to fictionalized it. »

Et plus loin, en introduction de l’analyse de « The birds » :

« It is not enough to say that the birds are part of the natural set up of reality. It is rather as if a foreign dimension intrudes, that literally tears apart reality
We humans are not naturally born into reality. In order for us to act as normal people who interact with other people who live in the space of social reality, many things should happen, like we should be properly installed within the symbolic order and so on, when this / our proper dwelling within a symbolic space is disturbed, reality disintegrates. »

Ces 2 phrases, je crois, me donnent une clé sur la raison pour laquelle j’ai donné le titre « My Life is an Interactive Fiction » à l’expo qui va avoir lieu à la galerie Duplex.
Je me suis questionnée sur ce titre (au départ une sorte de blague à épisode avec Marie Daubert pour décrire notre vie sociale), qui m’est venu comme une intuition. Mais je savais que derrière cette intuition, il y avait quelque chose de très réel, que je n’arrivais pas à définir précisément.
Et depuis le début de la conception de cette exposition, le mot fiction – et son compagnon en ion – narration – me posaient problème. Car, malgré leur présence qui me semblait essentielle, je n’étais pas en présence d’une réflexion ou dans la construction d’une narration fictionnelle.
Oui, bien sur, ces travaux en cours parlent de la réalité contenue dans toute œuvre de fiction. Mais surtout, l’idée est plutôt de réfléchir à la connexion de ces deux modes de construction du récit, sans qu’ils deviennent des éléments constitutifs des propositions.

La lecture du catalogue « Just a Walk » et quelques discussions plus tard, je réussis à définir que ce principe d’extension, ces débordements de territoires présents dans les différents travaux que je suis en train de produire sont à la fois structures et principes révélateurs.
Ce sont soit des crossovers formels, des extensions de types référents comme dans « Still On » (références à, et extensions du travail d’un artiste – ici On Kawara – dans un autre médium et dans une autre réalité) ou encore des débordements d’espaces géographiques réels, comme dans « Sweet Dream ». Parfois aussi extensions entre postures sociales et réalité (les statuts dans facebook utilisés comme matériaux, dans « This Face of the Earth » un projet en développement : ).