Premiers tremblements

tremblement

Me voilà de retour à Tokyo et mon voyage tire doucement à sa fin. La chaleur est toujours aussi écrasante. Hier soir, je dîne avec Aï et Fred. Quelques verres, la conversation s’attarde, je me couche tard, enfin, éteinte.
Je dors. L’air conditionné allumé, j’ai presque froid : je tire la couverture, inconsciemment.
Je dors profondément, et avec plaisir. Je dors, et l’on me secoue. La conscience me revient, j’ai dû dormir trop tard, Aï doit être en train de me réveiller. J’ouvre les yeux : personne, mais on me secoue.
Il fait noir, il fait nuit. Je ne suis pas pleinement réveillée, je m’appuie sur mon coude. Je constate cette sensation de perte d’équilibre liée à l’ébriété, mais je ne suis pas ivre. Je m’allonge, immobile quelques secondes, j’épie mon corps. Non, je ne suis pas ivre.
La terre tremble. Et moi avec. N’est-ce pas drôle qu’un tremblement de terre dicte à mon corps la réaction physique de la peur ?
Pourtant, à travers ce tremblement imposé, malgré moi, pas de crainte, mais de l’étonnement. Allongée à l’horizontale, les yeux fermés ; les deux mains à plats de chaque côté de ma tête, j’oscille. Pendant une trentaine de secondes. Puis la terre cesse de trembler et je sens encore les vibrations dans ma chair bien après. Je guette les bruits et tout est paisible. Silence dans l’appartement, dehors, j’écoute encore un moment pour savoir si ça va recommencer.
À travers le fin futon, j’écoute la terre. Les idées embuées, je me remémore les paroles de Yoshiko qui, quelques jours plus tôt m’a décrit les mouvements des tremblements de terre. D’abord horizontal, le plus dangereux puis vertical, plus déstabilisant. Plus l’horizontal dure longtemps, plus l’épicentre est loin. Je n’ai pas senti les spasmes verticaux, je devais être encore trop ensommeillée. Je m’endors. Je dors.

1 Commentaire

  1. Julie Morel (Auteur de l'article)

    Le lendemain matin, au petit-déjeuner, j’ai demandé à Fred comment il avait vécu le tremblement de terre, car je ne les avais pas entendus remuer dans leur chambre, ni eux, ni Amélie (leur petite fille), il m’a dit : »Quel tremblement de terre? »… J’imagine qu’on s’habitue à tout, même à 5,3 sur l’échelle de Richter…

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