Dans quelques jours, je commencerai à travailler sur le projet de recherche « De l’archive et de l’auto-archivage immédiat comme Å“uvre ». Ce projet de recherche a été accepté par le conseil scientifique de la recherche et des études de la DAP et il est porté par l’École supérieure d’art de Lorient et l’association des écoles d’art de Bretagne. Il regroupera plusieurs artistes, critiques, tous enseignants. Notre première réunion de travail aura lieu vendredi prochain !
Une présentation du contexte de la recherche et du projet aura lieu mercredi 17 novembre 2010, au matin, à la DAP, lors du séminaire consacré à la recherche.
Le projet a émergé au fil des rencontres et des expériences que j’ai pu avoir cette année dans le domaine des archives. Notamment lors de l’atelier à L’ESAC (Pau) pendant le festival Access, la conférence à l’IAV (Orléans) et surtout lors de mon séjour aux Archives départementales dans le cadre des résidences de l’art en Dordogne.
En voici la note d’intention :
L’art numérique et la textualité d’internet ont profondément transformé le principe et les modalités de l’écriture qui emprunte des supports de plus en plus interactifs. L’utilisation des supports artificiels de mémoire par les artistes au cœur même du processus de création, tend à réduire encore la distance qui sépare l’acte de création et sa restitution finale.
Le blog, notamment, a été investi par de nombreux artistes numériques et contemporains, jusqu’à en faire œuvre : à la fois interface, atelier ouvert, c’est un processus de création partagé qui se rapproche d’une pratique de notation quotidienne comme peut le faire Jonas Mekas ou encore aux «hypomnémata» tels qu’évoqués par Foucault dans «l’écriture de soi». L’apparition des blogs a permis un nouveau type d’archivage : l’auto-archivage immédiat, qui, non figé, se reconstitue en permanence, et sur lequel le lecteur peut interagir. Ainsi, l’oeuvre-archive inclut sa genèse, ses hésitations, ses retours, ses commentaires, ses silences, sa réception. Cette émergence produit de nouvelles formes plastiques et esthétiques fondées sur le réseau, l’interactivité, le flux, le fragment, la pluralité des discours.
A ce jour, les blogs, que ce soit comme outils pour les créateurs, comme moyen plastique pour les artistes, ou dans le milieu des étudiants en art, sont extrêmement répandus. Or, il n’existe aucune recherche qui rende compte de l’étendue et de la qualité de ce phénomène. Encore moins de retour critique et d’expériences concrètes & conscientes de cette pratique.
Cette recherche s’inscrit de manière générale dans un large mouvement contemporain qui regroupe l’archive comme objet média, et l’archivage comme oeuvre & comme principe relationnel. Une partie de cette recherche sera donc consacrée aux différents principes de documentations comme projet. Car il ne s’agit pas ici de lister un nombre d’expérimentations ou d’espaces d’archivages d’artistes dont le contenu serait intéressant, mais bien de s’emparer de ces outils et les transformer en matière à pratiquer une recherche jusqu’à en faire œuvre, tout en y portant un regard critique.
Responsable scientifique : Julie Morel
Équipe : Reynald Drouhin, Sylvie Ungauer, Dominique Moulon, Grégory Chatonsky, Gwenola Wagon, Karine Lebrun.
Financement : DAP / Association des écoles d’art de Bretagne.
Bonjour Julie,
Ci-dessous un texte sur la notion d' »archive recombinante », posté sur quelques listes il y a quelques jours. J’ai l’impression qu’il recoupe votre thème de recherche.
» Une archive recombinante est l’état temporaire d’un processus d’archivage. Ce processus tend à faire ré-émerger des données enfouies et masquées, mais pré-existantes, afin de reconstruire une histoire passée. Le positionnement de ces éléments ré-émergents les uns par rapport aux autres fait apparaitre de nouvelles configurations. La structure dans laquelle sont projetés ces éléments ré-émergents est elle-même inscrite dans le flux de la transformation présente. L’archive recombinante est alors l’état apparent, à un moment donné, du processus qui transforme le passé en futur. L’archive recombinante est une direction dans l’ordre, ou le désordre, des choses. La variation permanente des associations entre artefacts, et la force des liaisons qui soutiennent ces associations, définissent la structure de projection à partir de laquelle s’effectue la fouille de données. La structure de projection varie en fonction des données ré-émergentes. Autrement dit, on observe une boucle de rétroaction entre la structure de projection et les données retrouvées. Cette boucle de rétroaction conduit l’évolution d’un passé transformé en un futur émergent. Relisons n fois le même livre, à la même page, et observons l’image qu’il génère dans notre esprit, afin de pouvoir sans cesse la requalifier. L’archive recombinante est un outil de transformation.
L’archive recombinante est une compression du temps. Les technologies d’indexation redéfinissent les contextes d’existences de toute chose pré-existante et des futurs possibles qui y sont liés. Ce contexte est la structure cible sans cesse en redéfinition sous l’impact de la boucle cybernétique de ré-émergence des données. La structure cible s’échappe d’elle même sous sa propre action. C’est ce que nous appelons l’évolution. Ce qui se passe avec les technologies numériques de réseaux et leurs convergences biotechnologiques, c’est la diffraction des modèles. L’explosion probabiliste des futurs existe dans les interfaces de visualisations de données et permet la manipulation des scénarios. Cette manipulation des interfaces a pour effet l’amplification de cette explosion probabiliste. Plus que jamais, à ce niveau, tous les choix sont permis. L’ampleur de cette liberté est proportionnelle aux règles et contraintes contingentes qui auraient pour objectif de rétrécir le cadre de notre existence, c’est à dire le cadre de notre conscience de cet état de l’archive que nous constituons. «
Merci Yann! : )
Tu sais de qui est ce texte?
oui, de moi…:)