Archive mensuelles: janvier 2012

A Pyrrhic Victory in Progress

En cours, un texte pour expliquer une première expérimentation plastique relative à mon voyage à Clipperton. Cette proposition est arrivée très rapidement, et serait montrée en avril au BBB (la production se faisant sans moi puisque je serai alors en voyage), tout de suite après mon retour, lors d’une exposition appelée « faux jumeau ».

Les tapis, moquettes, et autres aplats qui recouvrent la plupart du temps les sols en intérieur paraissent être des éléments décoratifs, voir peu importants, que l’on piétine sans s’en rendre compte.
Pourtant ces zones de recouvrement délimitent un territoire et sont souvent des espaces symboliques : des représentations abstraites du jardin dans les tapis de la culture perse, à la moquette rouge que l’on déroule lors de cérémonies officielles, en passant par l’espace religieux du tapis de prière, les exemples sont nombreux.
Et en un sens, le tapis est toujours un moyen d’être transporté, et il ne semble pas sans hasard qu’il ait été utilisé à cette fin dans de nombreux contes (le tapis volant).

Le tapis de sol que je propose dans l’installation A Pyrrhic Victory pour l’exposition « faux jumeaux » (avril 2012) peut se lire comme une prise de position, à la fois dans le sens de prendre un point de vue, mais aussi dans le sens de prendre (gagner) une position (stratégique).

Ce faux jumeau symbolique de l’île de Clipperton – ou je me rends au mois de mars dans le cadre d’une mission scientifique & artistique, et point de départ de cette réflexion – en reproduit les enjeux territoriaux.
Clipperton, nommée aussi l’île de la passion, est un point perdu dans l’océan pacifique, si petit et si plat que l’on peut passer à côté sans le voir. Un point néanmoins stratégique, ou le paradoxe d’un territoire dont les frontières minuscules que dessinent la nature sont remises en cause, augmentées par des frontières juridiques[1], formant une zone immense, insécable, et convoitée.

Le titre de cette proposition « A Pyrrhic Victory » fait référence, avec humour, à une expression militaire : une victoire à la  Pyrrhus étant une victoire avec un coût dévastateur pour le vainqueur. J’hésite encore à appeller le projet « A Pyrrhic Victory in Progress », histoire de lui donner un côté désastre annoncé.. ; )


[1] Le droit de la mer, augmente de 3 milles marins les territoire terrestres. Ce droit place la France en 2ème position par son espace maritime, après les USA.

Références pour Archives num

• DIAL HISTORY / Johan Grimonprez

« Dial History » est une recherche axée sur les archives télévisuelles et remet en question le spectacle médiatique. Le récit historique du détournement d’avion constitue le point de départ d’une analyse de l’impact des images sur nos sentiments, notre savoir, notre mémoire.
Les rêveries fragmentales d’un écrivain anonyme autour du pouvoir de l’écriture, dans une époque appartenant aux poseurs de bombes et aux pirates de l’air hypermédiatisés, focalisent à la fois le désir de catastrophe et le besoin de se sentir chez soi.
Au milieu du flot ininterrompu d’informations inutiles et contradictoires, le terroriste, lui, en promettant identification et récit, pathos et catharsis, suscite, comme chaque catastrophe réussie, un flux de sentiments entre l’image et le spectateur. Le succès de la « télévision-réalité » témoigne de l’alliance des médias, des téléspectateurs et de la catastrophe.

dial history

• Lettres de Sibérie / Chris Marker

http://fr.wikipedia.org/wiki/Lettre_de_Sib%C3%A9rie
http://www.dailymotion.com/video/x5snyk_lettres-de-siberie-extrait_news
http://iconotheque-russe.ehess.fr/film/263/

DEDANLÉMO – Pretty Good Privacy

Des recherches en cours pour le travail à exposer lors de « Dedanlémo » (commissariat par David Poullard et Pierre Di Sciullo) et qui aura lieu à la halle Roublot (Fontenay sous bois) en avril..
J’ai suivi une première piste qui n’a pas aboutie, le matériau (colle) ne semblait pas adapté, et risque de ne pas être efficace à l’échelle demandée.
L’idée que je suis maintenant est de travailler sur une transposition de l’alphabet vers des signes les plus simples possible.
J’ai regardé diverses écritures dont les lettres sont des transpositions de l’alphabet en signes (le morse, le braille, etc.), mais aussi les cartes perforées. J’ai décidé de travailler à partir d’une grille de 30 cases : 26 pour les lettres, le reste pour la ponctuation de base).

What Happens in Halifax Stays in Halifax

En 1969 Robert Barry, invité au Nova Scotia College of Art and Design d’Halifaxen, propose aux étudiants un projet conceptuel basé sur le partage d’une idée, et sur le secret de ce que cette idée peut être et peut produire. Le projet n’existe donc qu’au sein d’un groupe d’étudiants, et ne doit pas être mis à jour sous peine de perdre sa raison d’être : «‘The piece will remain in existence as long as the idea remains in the confines of the group.’”».
En 2004, Mario Garcia Torres mène une enquête et rencontre les étudiants qui ont participé à cet atelier. Il leur demande s’ils ont gardé le projet caché, avec quelles difficultés et si cela leur a paru une expérience importante, et de quelle manière ce projet a eu un impact sur eux.
Il tire de cette enquête un diaporama N&B d’une cinquantaine d’images +bande son + d’interviews de 9 des anciens étudiants : on y voit défiler lentement images d’archives, photos des différents lieux, monuments/témoins d’un moment important de l’art conceptuel, mais dont on ne sait finalement rien. A la vision de ce diaporama, on prend toute la portée du paradoxe entre valeur de l’expérience liée à un projet conceptuel, et l’absence de diffusion au public de celui-ci. Et ce qui semble au centre de tout : le déplacement du projet initial car on peut se demander : qu’est ce qui fait projet? Le projet que les étudiants et Barry ont mis en place ensemble, réalisé et gardé secret, ou le projet global qui est le protocole de départ (un projet qui doit rester au sein d’un groupe, et dont l’existence dépend de ce protocole)? On pourrait même se demander s’il y a eu véritablement production, si cela aurait eu une importante..
J’aime autant l’idée de Robert Barry que sa « restitution » par Mario Garcia Torres (finalement assez romantique) mais qui ajoute une couche de sens au projet initial : il se sert du travail de Barry pour faire un projet comme Barry se sert du travail de ces étudiants pour faire un projet). Un méta-projet donc, ou comment raconter l’art conceptuel : entre son immatérialité et son impact sur l’histoire de l’art.