Archive mensuelles: septembre 2014

Artiste modèle

Les artistes surréalistes et leur prédécesseurs romantiques étaient les descendants de ces proto-bohémiens dans Les enfants de Saturnes :  » (…) un nouveau type d’artiste (…), dont la personnalité se reconnaît à certains traits spécifiques. Leur manière de travailler se caractérise par la succession de phase d’activité furieuses et de pause dans la création, leur structure psychologique se distingue, elle, par une introspection angoissée, leur tempérament par une tendance à la mélancolie, et leur comportement social par un intense désir de solitude et par des excentricités d’une variété infinie. » Excentricité auxquelles feront écho celles des Expressionnistes Abstraits et des Surréalistes, dont Lee Krasner rapporte qu’ils rivalisaient en exhibant dans les soirées, comme des caniches de concours, leur épouses attifées de robes du soir extravagantes – un sexisme qui court tout au long du modernisme, dont le modèle féminin dans l’atelier est un autre témoignage.
(…)
Le modèle est fondamentalement femme, le Romantisme l’a fait passer du statut trivial qui était le sien à celui de muse, de collaboratrice passive, d’indicateur (pour reprendre Kris) de la sexualité de l’artiste. Kris cite à ce sujet le mythe de Pygmalion et Galatée : il traduit le désir qu’éprouve l’artiste de créer un être vivant plutôt qu’un simulacre – le mannequin femelle à la Kokoschka. Le modernisme c’est aussi un défilé de modèles célèbres, de la Jo Hefernan de Courbet (il la partage avec Whistler) et de la Victorine Meurent de Manet à la Kiki de Man Ray et aux femmes de Picasso : elles furent toutes expulsées de l’atelier lorsque sonna l’heure du plus distingué des produits du modernisme, l’abstraction.

Le nu devenu muse, dévêtu et offert au regard masculin, modela aussi l’aptitude féminine à se transformer en chambre d’écho du désir masculin – un désire sublimé au foyer de la création, dans l’atelier désormais sexué, le ventre d’où sortait l’œuvre. Dans les années 50, l’acte créateur devint un fétiche en vogue qui exemptait le spectateur du tourment de se mettre à l’œuvre. Le mystère de l’œuvre se vit déplacé vers le mystère de la création, tout aussi indéchiffrable (donc confortable) mais qui recueillait le bénéfice de son énergie subversive. L’artiste et son modèle dans l’atelier : le motif regorgeait de paradoxes qui brodaient sur le cliché de l’acte créateur.
La rhétorique de l’acte artistique est bien connue : insémination extatique par l’idée, naissance de l’œuvre, labeurs du processus, exhaustion de l’auteur. Un singulier commerce sexuel : c’est la langue de l’accouchement un travail de femme ! Sexisme à rebours ! Le modèle de la parturition, un modèle féminin, et le paradigme de la création masculine. À moins (une version plus charitable), que les hommes aient tentés de prendre part à ce mystérieux processus dont ils sont exclus, la naissance. Parce que si c’est à travers le modèle que l’artiste délivre son œuvre, ne pourrions pas prétendre que c’est le modèle féminin qui insémine l’artiste mâle ? Dans ce scénario, Picasso, sexiste entre tous, joue le rôle de la femme. La fertilité du modèle s’étend à l’atelier lui-même, régulièrement ensemencé par l’union de l’artiste mâle et de son modèle. L’acte créateur fait valser nos préjugés des rôles sexuels et de l’activité artistique. Le point crucial ici, c’est la manière dont l’atelier devient le lieu de la création, le premier contexte de la transformation. Aussi encombré ou dépouillé soit-il – désordre chaotique ou sainte retraite -, c’est la fécondité qui, avant toute chose, le caractérise; le processus qui s’y déroule est sa marque. Du modèle fécond au ventre généreux de l’atelier, il y a continuité. Quoique parfois les choses soient d’un comique plus banal : sur une merveilleuse photographie prise à Nice en 1928, le modèle jette un regard noir sur Matisse boutonné jusqu’au menton et qui ne se doute de rien. La vengeance du modèle ?

Dans : « L’atelier et le Cube », Brian O’Doherty

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Denise Bellon
(photo documentant l’exposition internationale du surréalisme).

Bon accueil

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Cette semaine, en préparant ma conférence sur le projet de recherche Géographie variables, je retrouve les photos de l’atelier mené un peu avant l’été avec mes étudiants de 2ème année des beaux-arts de Lorient.
C’est à Marin’accueil, à quelques pas de l’école. Trois mois de travail en amont avec et par les étudiants, et trois belles journées de travail sur place pour réaliser le projet.
Pour que les marins débarqués de tous les pays du monde puissent avoir un endroit sur le port où se connecter à Internet qui soit accueillant. Internet et la mer. Des nœuds et des vagues, un peu comme dans mon estomac.

Hypothèse de l’impact géant – Exposition du 4 octobre au 29 novembre, au Carreau (Cergy)

La première exposition commisariée par le collectif Le sans titre (Cécile Azoulay, Cécile Babiole et moi-même) s’appelle Hypothèse de l’impact géant. Elle aura lieu au Carreau du 4 octobre au 29 novembre 2014.

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Vernissage le vendredi 3 octobre à 18h30,
performance musicale de Frédéric Nogray à 19h
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Avec : Yuri Ancarani, Cécile Beau, Emilie Benoist, Bureau d’études, Revital Cohen & Tuur Van Balen, Cléa Coudsi & Eric Herbin, Baptiste Debombourg, Nicolas Durand, Iris Heurtaux, Martin Howse, Jan Kempenaers, Atsunobu Kohira, Aleksandra Mir, Adelin Schweitzer, Ken & Julia Yonetani

L’Hypothèse de l’impact géant est le nom de l’une des théories émises par la communauté scientifique concernant l’origine de la lune : il y a plus de 4,5 milliards d’années, une collision entre la Terre en formation et un corps céleste de grande taille aurait éjecté la matière suffisante à la formation de notre Lune. L’exposition éponyme part de cette hypothèse et explore plus globalement ce qui est commun et compose ces deux astres : les minéraux.

L’exposition se place sous le signe d’une quête fantastique oscillant entre les différentes applications, connotations et implications de l’élément minéral.
Elle explore :
– Une quête scientifico-philosophique relative à nos origines ou à la trace de l’histoire dans ces minéraux,
– Une quête plus prosaïque de richesses matérielles (or, coltan, pétrole, terres rares) dont les enjeux sont aujourd’hui plus que jamais stratégiques et géopolitiques.

Les œuvres proposent ainsi des questionnements et points de vue qui abordent le minéral dans sa dimension géopolitique ou technologique (prospection, extraction, etc.), mais aussi sous un angle symbolique : mythologique, fantasmagorique, science-fictionnel…


Quelques images d’une partie des pièces présentées…

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Jan Kempenaers

 

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Clea Coudsi, Eric Herbin
 

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Cohen, Van Balen

 

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Baptiste Debombourg

 

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Martin Howse

 

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Julia + Ken Yonetani

 

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Aleksandra Mir.

 

 

Info :
Le Carreau, espace d’art visuel de Cergy
3-4 rue aux Herbes, 95000 Cergy

Du mardi au vendredi : 12h-19h / Samedi : 14h-19h (entrée libre et gratuite)

L’exposition se poursuit à Visages du Monde avec l’installation d’Adelin Schweitzer présentée le samedi 4 octobre à 18h30 l’occasion de la nuit blanche.
Installation visible du 5 octobre au 14 novembre 2014

10, place du Nautilus, 95000 Cergy
Mardi /Jeudi / Vendredi : 12h30-19h / Mercredi : 10h-19h / Samedi : 10h-18h / Dimanche : 10h-17h (entrée libre et gratuite)

A.F.K

Je me suis rendue mardi au Quartier centre d’art (Quimper) pour une rencontre de travail avec Keren Detton – commissaire et directrice du lieu – autour de l’exposition A.F.K. qui aura lieu dans la Project room en avril 2015.
L’exposition prend comme point de départ une pièce présentée en février à la galerie de Étables. Une proposition en cours, alors volontairement non résolue : une perruque noire, en vrais cheveux, simplement posée sur une table, face à une fenêtre et un dessin à l’encre : « Void » (vide).

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Je pars donc sur une nouvelle version de la pièce, plus travaillée formellement et qui va faire le lien avec une proposition explorant Silk road, site de marché noir en ligne, désormais fermé dans sa version d’origine.
Mes avancées sur ce projet sont lentes, notamment parce qu’il nécessite une grosse partie de recherche en ligne, sur TOR (qui reste un navigateur assez lent par rapport à la normal) et qu’il est assez peu clair de tracer la nouvelle localisation du site ou des ces sites de remplacement (project black flag, black market reloaded..), et qu’il faut être prudent et installer quelques outils de sécurité pour ne pas retrouver son disque dur plein de virus ou être victime de fishing. Je ne suis pas une spécialiste du Darknet et des failles de sécurité de mon ordinateur.
Il est également difficile de remonter dans l’historique des propositions de ventes sur Silk road, mon objectif étant de me concentrer sur deux choses :
– le marché noir d’œuvres d’art sur ce site (une toute petite partie de celui-ci, quelques centaines d’œuvres y ayant transité),
– savoir s’il existait aussi du trafic humain, ou des portes vers celui-ci.

 

Ci-joint pour référence, un article copier/coller du monde sur la fermeture du site en oct. 2013. Je garde l’article ici, avant que celui-ci ne passe dans les archives payantes. Je note aussi au passage que l’article n’a pas d’auteur, il est signé « Le Monde » (comme nombres d’articles du journal en ligne !).

 

Le principal site de commerce de produits illégaux du Net revient, plus d’un mois après sa disparition. Silk Road est un site web « caché » (uniquement accessible par le réseau anonyme TOR) qui s’est spécialisé dans la vente de produits illégaux, avant tout des stupéfiants.

Les transactions entre vendeurs et clients ne se faisaient qu’à l’aide de la monnaie « chiffrée » Bitcoin, qui échappe encore à toute régulation. La place de marché, qui se rémunère par commission sur les ventes, était le principal représentant de sa catégorie.

Sa fermeture par le FBI a été un choc pour les utilisateurs de TOR, un réseau considéré intraçable. Mercredi 6 novembre, « Silk Road 2.0 » a été mis en ligne, pour reprendre un flambeau très convoité. « Le FBI a mis deux ans pour faire ce qu’ils ont fait. […] Mais il n’a obtenu que quatre semaines de silence », affirme fièrement le nouveau responsable dans un message en tête du site.

Lire : Les conséquences de la fermeture de Silk Road

La nouvelle version est similaire à la précédente, mais serait reconstruite par un nouveau propriétaire, qui reprend le pseudonyme – Dread Pirate Roberts – de son prédécesseur. Notamment sur Twitter. Actuellement, la page d’accueil du site parodie le message de fermeture des autorités américaines.

En plus des sécurités de la première version, le nouveau Silk Road permet de signer les transactions avec une clé spécifique (PGP). Quelque 12 500 personnes se seraient inscrites, une journée après l’ouverture. Même si les anciens vendeurs sont toujours recherchés, le site a été rapidement repeuplé de nouvelles annonces.

LE PREMIER « PROPRIÉTAIRE » DEVANT LA JUSTICE

La réouverture intervient alors que Ross William Ulbricht, le propriétaire présumé de Silk Road première version, comparaissait pour la première fois devant une cour new-yorkaise. Il est notamment accusé de piratage informatique, de trafic de drogue et de blanchiment d’argent.

Le maître présumé de Silk Road, considéré comme un petit empire de la drogue, avait été arrêté le 1er octobre et le site fermé dans la foulée. Malgré ses nombreuses précautions, le responsable du site aurait été trahi par une adresse mail utilisée sur un forum plusieurs années auparavant.

Lors de son arrestation, 26 000 bitcoin ont été saisis, soit 0,2 % du total en circulation à l’époque. Une prise record dont la valeur fluctue au gré de la valorisation de cette monnaie alternative, qui atteint désormais plus de 300 dollars.

Le réseau caché TOR est désormais particulièrement ciblé par la police américaine. En août, le FBI avait fermé Freedom Hosting, considéré comme le premier hébergeur mondial de sites pédophiles, également réservé aux utilisateurs de TOR. La grande majorité des sites accessibles via le réseau anonyme y étaient hébergés. Son propriétaire a été arrêté et des pièges ont été posés sur les sites pour démasquer les internautes.

La concurrence de Silk Road, auparavant déjà vive, s’était intensifiée à sa disparition. En octobre, d’autres concurrents ont tenté de tirer profit de cette énorme manne financière, qu’il suffisait de capter. Même si tout n’est pas si simple.

Un rival, Atlantis, a brutalement fermé, emportant avec lui l’argent déposé sur les comptes des utilisateurs. Un second, Black Market Reloaded, a dû lui aussi fermer temporairement ses portes à la mi-octobre, suite à une « faille de sécurité ». Un administrateur avait laissé échapper le code du site sur Internet. L’administrateur d’un autre service, Project Black Flag a quant à lui « paniqué », fermé son site et volé l’argent en stock.

Courant octobre, au moins six sites tentaient de combler le vide laissé par l’e-commerçant de produits illégaux, rapportait le blog spécialisé Atlantis Blog.

Collectif Le sans titre

Depuis 6 mois, Cécile Babiole, Cécile Azoulay et moi-même nous sommes constituées en collectif pour travailler des projets curatoriaux, choses que nous faisions auparavant en solitaire.
Notre premier projet « Hypothèse de l’impact géant », exposition qui explore la relation entre la Terre, la lune et leurs ressources, verra bientôt le jour au Carreau, l’espace des arts visuels situés juste à côté de l’école de Cergy-Pontoise. Rendez-vous le 4 octobre pour le vernissage.
En attendant, notre site est enfin en ligne, à cette adresse : lesanstitre.net

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En cours

Je travaille actuellement sur mon nouveau site internet, mise en ligne courant octobre. J’y privilégie les images, et classe mes projets selon 3 entrées :
– Projets (un listing de tous les projets)
– Expositions (dans l’espace d’exposition, dans l’espace d’internet)
– travaux périphériques (commissariat, art graphique, projets collectifs)

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Neutral Grounds

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Quelques nouvelles du projet « Neutral Ground », que je réaliserai en novembre-décembre à la Nouvelle Orléans.
> Une première image, que j’ai du soumettre à Park & Parkways, l’équivalent de nos services « espaces verts », qui m’ont contacté pour connaitre le contenu du projet. Difficile de « vendre » un projet in situ, de proposer un cadre de travail en fonction du contexte plutôt qu’une pièce déjà conçue à l’avance (j’avais rencontré ce même problème à l’Institut Français pour ma présentation pour les Résidences américaines).
Pourtant, il parait essentiel de passer ce premier mois à la Nouvelle Orléans à comprendre les neutral grounds, plutôt que d’arriver avec une attitude que je qualifierai de colonialisme artistique. Important de connaitre en profondeur les neutral grounds, leur histoire, le contexte contemporain de la ville et de ces espaces, les relations qu’ils « fabriquent » et permettent entre les habitants, utilisateurs (ce sont des lieux publics occupés quotidiennement) et toute la sociologie liée à ceux-ci.
J’ai donc soumis cette photo (texte non contractuel mais je n’ai pas pu m’empêcher de faire clin d’œil à cet idée de « programme ») pour donner un exemple, spécifiant bien que le projet pouvait changer complétement en fonction des recherches et rencontres sur place.

 

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> Proposées par le Louisiana State Museum, les 3  possibilités d’implantations de ma proposition sont :
– la zone médiane juste en face du Old US Mint (où se trouve le musée et le collection) sur Esplanade Ave,

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– à quelques minutes de là, celle sur Elysian Fields Ave (les champs Élysées nouvelle-orléannais), au croisement de Decatur, juste à côté du Mississippi.

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– et enfin, un peu excentré (mid-town), mais plus chic : un terrain neutre au croisement de Marconi Dr. près de City Park.

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> Quelques images enfin, glanées ses derniers jours sur des projets utilisant de la pelouse ou plantes couvrantes comme matériau.

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Chilpéric de Boiscuillé, Raphaëlle Chéré & Pauline Szwed

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Jean-Philipe Poirée

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Luc Boniface

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Jean-Philipe Poirée (image avant et après)

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Daniela Borroni, Susanna Rossellini & Simona Venturelli