21h42. Mon appartement à la Chambre Blanche est comme une somme d’îlots disparates et éloignés qui flottent au milieu d’une immense mer de bois.
D’abord il y a l’îlot bureau, éclairé par une de ces anciennes lampes en opaline verte avec, échoué sur la droite, l’ordinateur qui ne marche plus, les câbles qui s’y rapportent, d’autres types de câbles, transformateur et une clé USB, appareils photos et les livres : Broken Screen, l’art conceptuel du CAPC, Cute Felt Animals, Aspect of the Theory of Syntax, et un livre de Joan Carroll Oats. La trousse à crayons rudimentaire (crayon papier, stylo à encre de chine diamètre 0.1, stylo à encre de chine diamètre 2.0, le cutter, la règle en fer, 15 cm). Et constamment des clés qui traînent, mes gants en laine orange, mon bonnet marron.
L’îlot « table », avec ses couverts, un morceau de fromage emballé, ses verres, ses tasses à moitié vides. Et ses quatre satellites, quatre chaises noires en fer.
Il y a l’îlot cuisine : toute en longueur. Un gros meuble en bois brut. Au dessus les étagères et les provisions, la cuisinière à droite, l’évier à gauche.
L’îlot lit, le dessus bleu foncé, une couverture vieux rose – ou est-ce une vieille couverture rose ? Une veste en laine marron et beige, pour lire le soir. Cet îlot est aussi éclairé par une des lampes vertes.
Au fond de la pièce un îlot moins proéminent composé d’une table basse et d’un fauteuil pour la lecture. C’est d’ailleurs sûrement celui que j’utilise le moins, mais avec le plus de plaisir. Il signifie un moment où je ne travaille pas du tout, et où je ne pense pas à travailler.
Le dernier atoll est planté au fond de la pièce comme s’il avait dérivé jusque là : armoire, valise et une table où s’empile le linge propre pas encore plié.
Quelle navigation parmi ces différentes portions de territoire ?