Organologie
« La musique invente, construit, fait des corps. Nos corps, mais qu’il nous reste à lire et relire.
Ce sont non seulement des corps techniques – ces prothèses, ces artefacts que forment les instruments –, mais aussi des corps vivant d’une vie étrange, fantomatique et survivante : aussi inouïs qu’une main avec plus de cinq doigts, que des pieds qui respirent tels des poumons, qu’un toucher à distance et sans contact.
L’Organologie, cette respectable discipline qui recense les corps sonores, est ici interrogée et quelque peu malmenée dans son corpus séculaire, pour qu’elle livre ce qu’elle recèle et préfère généralement cacher : des organes inédits, des hybridations et des greffes sorties d’une fiction agissante, des monstres et des chimères qui guettent l’occasion pour prendre corps, en effet(s).
Au-delà de ces corps singuliers que la musique compose et dépose, ce sont enfin des figures d’un corps collectif, “social â€, qui surgissent au milieu d’un appareillage d’innervations à distance, télépathiques. »
Peter Szendy
Vernissage à Plateforme
Le vernissage est une norme de présentation d’exposition inadaptée et peu généreuse. Depuis longtemps je me demande comment expérimenter une autre forme : quelque chose de plus proche du geste artistique, plus sincère et prolongeant le travail présenté.
Le lancement d’une exposition devrait être en cohérence avec la proposition artistique, l’ouvrir, voir en donner un instant une autre interprétation, ou encore même la remplacer (je pense par exemple à la démo), la questionner.
Dans mon idée, il faudrait aussi garder cet élément de rencontre sociale qui reste au cœur de cet évènement, mais en le rendant moins contraint & artificiel.
L’exposition « Bonus Track » à Plateforme m’a donnée l’occasion d’envisager et détourner la fonction de cet évènement dans son ensemble. J’ai en effet proposé à Laurie Bellanca et Phabrice Petit Demange des Lumineuses fièvres de travailler à un « bonus track » (= une chanson en plus) d’après un des morceaux du CD audio « Partition » qui est au cÅ“ur de l’expo, puis de faire un concert devant un néon, celui là même qui annonce : Bonus Track.
La soirée d’ouverture a donc été rythmée par des quart-d’heures américains – leur marque de fabrique – toutes les heures environ. Les visiteurs se sont rapidement pris au jeu, et victime de son succès, le vernissage s’est terminé vers 4h du matin ; )
Je suis très contente de cette proposition et c’est une chose que je n’aurais pas pu faire sans le concours des Lumineuses fièvres et de l’équipe de Plateforme (notamment Nicolas Maigret qui m’a aidé toute cette journée de montage).
Quelques photos prises par Vadim Bernard lors de cette soirée…
Et un article à propos de l’exposition, de Marie Lechner dans Libération.
Storm Session
Je rentre à peine de la première « Storm Session ».
Après une journée de pluie, Marie qui a le génie des titres, a intitulé ainsi cette séance de répétition que Zoé, Marie et moi-même avions de longue date décidé de nous infliger ce soir.
Pour Zoé, c’est une récréation musicale (hors de son groupe The Konki Duets) où elle peut exercer ses talents de batteuse. Pour Marie c’est un retour au source, un moment hors du graphisme… Pour moi, qui n’ai jamais touché un instrument de ma vie, c’est l’occasion de pratiquer une « activité » hors de l’art contemporain, sans me soucier de recherches, de cohérence, de rhétorique. Bref, de manière totalement décomplexée… Et au début, on a beau être sans complexes, c’est dur de produire à partir de rien, je me suis sentie un peu perdue.
Pourtant la magie a opéré. Et petit à petit, un dialogue s’est instauré entre nous, j’ai eu l’impression d’avoir une conversation avec Marie et Zoé, de composer – non pas avec la guitare – mais avec deux autres personnes, avec trois rythmes différents. Il m’a semblé que je me glissais dans un interstice : entre le rythme donné par la batterie de Zoé, et les sons produits par la basse de Marie… Bizarrement, c’est sur l’interaction entre nous que s’est bâtie ma première expérience musicale.
Vivement samedi prochain.