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CARTOGRAPHIES DE L’INVISIBLE, 19 avril à la BNF et 20 avril 2013 à la Gaîté Lyrique

JulieMorel_bnf

Comment lire un million de pages de mangas en un seul coup d’oeil ? Comment déconstruire nos catégories culturelles et artistiques grâce à la visualisation des big data ? Comment représenter l’information sur le réseau ? Comment naviguer dans les paysages de données ?
Archiver, comptabiliser et cartographier nos désirs les plus intimes sont autant de rouages de l’économie à l’ère des réseaux. Derrière l’accumulation massive d’information et de signes découlant de cette activité, peut-on déceler des structures « à grande échelle » qui révèleraient un envers du décor, des formes récurrentes invisibles à l’œil nu qui annonceraient une météorologie du discours ?
Ces journées d’études, destinées à un public non spécialiste, artistes, théoriciens, scientifiques, viendront éclairer ce qui se joue au cœur de ces mécanismes. Plus précisément, il s’agira, tout en gardant une distance critique, de tenter de comprendre comment l’art, la littérature, l’esthétique et le politique peuvent s’en trouver transformés.

> Vendredi 19 avril 2013 9h30-19h00 à la BNF
> Petit Auditorium, entrée libre

Cartographies de l’invisible. Art, réseau, big data

Avec : Jacqueline Sanson, Marie Lechner, Marie Saladin, Christophe Bruno, Tommaso Venturini, Axel Meunier, Lev Manovich, Julien Prévieux, Claire Leroux, Chrystelle Desbordes, Etienne Cliquet, Julie Morel, Roger Malina, Maximilian Schich, Annick Bureaud,

 

 

Auto-archivage immédiat / Séminaire à l’EESAB, les 7-8-9 décembre 2011


Le séminaire de la ligne de recherche « De l’auto-archivage immédiat comme œuvre » aura lieu les 7-8-9 décembre 2011, à l’EESAB, site Lorient.
L’entrée est libre, et les intervenants intéressants, venez nombreux!

« Notre société a une relation complexe à la mémoire et développe depuis l’après-guerre
une hypermnésie. Cette hypertrophie de la mémoire s’est encore accentuée depuis
l’apparition de l’ordinateur (bases de données fermées) et internet (bases de données
ouvertes et partagées) et la démocratisation des supports artificiels de mémoire.
Cette démocratisation, cet accès à un auto-archivage immédiat change le statut
même de l’archive et notre manière d’appréhender l’information, l’histoire, l’art.
Ce séminaire tentera de questionner l’auto-archivage immédiat, c’est-à-dire l’archive
dans sa capacité à se reconstituer en permanence et sur laquelle on peut interagir à
tout moment, devenant fluctuante, variable, instable ».
> http://incident.net/recherche

Au programme :

Mercredi 7 décembre
14h – 17h : Yann Sérandour / Jean-Noël Lafargue / Maurice Benayoun
Jeudi 8 décembre
9h – 12h : Christophe Bruno / Joëlle Bitton / David Guez
14h – 17h30 : Jérome Joy / Reynald Drouhin, Sylvie Ungauer / Dominique Moulon
18h : Performance de Damien Schultz
Vendredi 9 décembre
9h – 12h : Manuel Schmalstieg / Hasan Helahi / Lionel Broye
12h30 : Lecture performée de Gwenola Wagon
École européenne supérieure d’art de Bretagne – site de Lorient
1 avenue de Kergroise
56000 Lorient
02 97 35 31 70

La ligne de recherche « De l’auto-archivage immédiat comme œuvre »
Direction scientifique : Julie Morel
Équipe de recherche : Reynald Drouhin, Grégory Chatonsky, Dominique Moulon, Karine Lebrun, Sylvie Ungauer, Gwenola Wagon.

Auto-archivage immédiat – La Chartreuse

Le programme de recherche « De l’auto-archivage immédiat » de l’EESAB se déplace pour une résidence d’écriture à la Chartreuse CNES du 17 au 28 octobre.
Y seront donc présents : Yannick Liron, Reynald Drouhin, Sylvie Ungauer, Julie Morel, ainsi que deux étudiants de l’EESAB (Alexander Morel et Gwendal Deshayes).
Rappel de cette résidence :
« Si l’apparition des blogs et autres types de stockage partagés en ligne a permis un nouveau type d’archivage : l’auto-archivage immédiat, qui, non figé, se reconstitue en permanence et sur lequel le lecteur peut interagir. La ligne de recherche De l’auto-archivage comme œuvre, initiée par l’École européenne supérieure d’art de Bretagne à Lorient, réunit artistes et critiques autour de la création d’une plateforme en ligne explorant cette oeuvre-archive qui inclut sa genèse, ses hésitations, ses retours, ses commentaires, ses silences, sa réception. La résidence à la Chartreuse prolonge cette recherche en proposant à un auteur – Yannick Liron – et un performeur – Damien Schultz – de travailler à partir des textes et médias générés par cette plateforme, sur des modalités liées aux flux. Ces données serviront de base pour expérimenter la production d’un texte destiné à être performé ».

Cette extension « hors les murs » du projet de recherche permettra de réaffirmer que la pratique artistique en temps que telle fait recherche et que les méthodologies que l’on inventent lors de production d’œuvres sont valident pour produire une recherche dont les « outputs » (propositions conceptuelles & plastiques, théoriques, éditoriales et autres restitutions) dialoguent et s’enrichissent les unes les autres.
Cette extension prolonge la recherche entamée (collectivement ou individuellement) et là malmène parfois,  dans un glissement de médium. Proposer à un auteur et un performeur de travailler à partir des textes et médias générés par la plateforme, c’est d’abord proliférer dans d’autres domaines que celui assignés à cette recherche, mais en gardant les modalités (flux, langage, archivages immédiats).

 

Exposition « Partition » au Bon Accueil – Rennes, du 7 janvier au 27 février 2011

Vernissage le jeudi 6 janvier à partir de 18h30
Rencontre autour du travail le samedi 8 janvier à 17h
Exposition du 7 janvier au 27 février 2011

« Avec « Partition », le Bon Accueil initie une nouvelle série d’expositions intitulée «Le caractère fétiche de la musique » proposant de découvrir des artistes pour qui la musique, soit comme objet d’écoute, soit comme objet matériel, joue un rôle important dans leur travail.  La première exposition de cette série s’intéressera à la représentation de la musique.

Les œuvres proposées par Julie Morel sont le fruit de la découverte fortuite de partitions du 19ème siècle appartenant à un fonds d’archives. Après avoir opéré une sélection de douze chansons parlant de la séparation amoureuse, Julie Morel les a réinterprétées et créé des versions au goût électro-pop, et translittéré les titres de ces chansons en braille que l’on retrouve dans l’exposition sous forme de néons.
« Partition » s’appuie également sur la plurivocité du mot qui en français désigne à la fois la notation d’une composition musicale mais aussi le fait de diviser un disque dur en plusieurs parties. Le thème de la séparation amoureuse fait écho, non sans humour, à cette division, séparation en plusieurs « morceaux », d’un disque dur.
Une exposition à découvrir comme une mix-tape que n’aurait peut-être pas réfuté le héros de « Haute Fidélité » du romancier anglais Nick Hornby,  et surement destinée au « Sad Mac » du musicien  Stephan Mathieu ».
Damien Simon.

Merci à :
Damien Simon, Yuna Amand, ABnéon, Sylvain Lebeux, Stéphane Morel, ACDDP & DRAC Aquitaine.

LE BON ACCUEIL
74 canal st martin
35700 Rennes
09 53 84 45 42
contact@bon-accueil.org

Conférence-rencontre à l’École des Beaux-arts de Nantes / Mardi 14 déc. 2010, à 13h

Le mardi 14 décembre, je serai à l’École des Beaux-arts de Nantes pour une conférence « Archive/réactivation », suivie d’une discussion-rencontre avec les étudiants.
Cette intervention portera sur la réactivation d’archives. Je présenterai notamment le projet « Partition », construit sur une pratique de réactivation des archives par la transgression. C’est à dire de ne pas simplement réinterpréter ou organiser des archives pour mettre en lumière leur caractère historique, sociologique, etc, mais pour s’en emparer comme matériaux de base pour une proposition plastique autonome.

Dans le cadre du projet de recherche Plugin.
Sera aussi présent lors de cette conférence : Adolfo Vera.
Invitation : Véronique Verstraete.

De l’archive et de l’auto-archivage immédiat comme œuvre

Dans quelques jours, je commencerai à travailler sur le projet de recherche « De l’archive et de l’auto-archivage immédiat comme œuvre ». Ce projet de recherche a été accepté par le conseil scientifique de la recherche et des études de la DAP et il est porté par l’École supérieure d’art de Lorient et l’association des écoles d’art de Bretagne. Il regroupera plusieurs artistes, critiques, tous enseignants. Notre première réunion de travail aura lieu vendredi prochain !

Une présentation du contexte de la recherche et du projet aura lieu mercredi 17 novembre 2010, au matin, à la DAP, lors du séminaire consacré à la recherche.
Le projet a émergé au fil des rencontres et des expériences que j’ai pu avoir cette année dans le domaine des archives. Notamment lors de l’atelier à L’ESAC (Pau) pendant le festival Access, la conférence à l’IAV (Orléans) et surtout lors de mon séjour aux Archives départementales dans le cadre des résidences de l’art en Dordogne.

En voici la note d’intention :

L’art numérique et la textualité d’internet ont profondément transformé le principe et les modalités de l’écriture qui emprunte des supports de plus en plus interactifs. L’utilisation des supports artificiels de mémoire par les artistes au cœur même du processus de création, tend à réduire encore la distance qui sépare l’acte de création et sa restitution finale.
Le blog, notamment, a été investi par de nombreux artistes numériques et contemporains, jusqu’à en faire œuvre : à la fois interface, atelier ouvert, c’est un processus de création partagé qui se rapproche d’une pratique de notation quotidienne comme peut le faire Jonas Mekas ou encore aux «hypomnémata» tels qu’évoqués par Foucault dans «l’écriture de soi».
L’apparition des blogs a permis un nouveau type d’archivage : l’auto-archivage immédiat, qui, non figé, se reconstitue en permanence, et sur lequel le lecteur peut interagir. Ainsi, l’oeuvre-archive inclut sa genèse, ses hésitations, ses retours, ses commentaires, ses silences, sa réception. Cette émergence produit de nouvelles formes plastiques et esthétiques fondées sur le réseau, l’interactivité, le flux, le fragment, la pluralité des discours.
A ce jour, les blogs, que ce soit comme outils pour les créateurs, comme moyen plastique pour les artistes, ou dans le milieu des étudiants en art, sont extrêmement répandus. Or, il n’existe aucune recherche qui rende compte de l’étendue et de la qualité de ce phénomène. Encore moins de retour critique et d’expériences concrètes & conscientes de cette pratique.
Cette recherche s’inscrit de manière générale dans un large mouvement contemporain qui regroupe l’archive comme objet média, et l’archivage comme oeuvre & comme principe relationnel.
Une partie de cette recherche sera donc consacrée aux différents principes de documentations comme projet. Car il ne s’agit pas ici de lister un nombre d’expérimentations ou d’espaces d’archivages d’artistes dont le contenu serait intéressant, mais bien de s’emparer de ces outils et les transformer en matière à pratiquer une recherche jusqu’à en faire œuvre, tout en y portant un regard critique.

Responsable scientifique : Julie Morel
Équipe : Reynald Drouhin, Sylvie Ungauer, Dominique Moulon, Grégory Chatonsky, Gwenola Wagon, Karine Lebrun.
Financement : DAP / Association des écoles d’art de Bretagne.

Agent

Depuis plusieurs mois, j’ai peu produit.
Une des raisons de ce ralentissement est un changement de mode de relation au travail et la conséquence du déséquilibre auquel j’ai dû faire face quand à la réalisation de cet état de fait qui s’est imposée petit à petit… Un changement de mode esthétique, car c’est peut-être de cela dont il s’agit ?
Je sais que depuis plusieurs années (comme pour nombre de personnes) mon travail artistique était une manière de me constituer, de me construire (je viens de faire un lapsus incroyable, je viens d’écrire « contredire » au lieu de « construire » ; ). Je me suis d’abord construite par le commun, via le collectif incident.net, puis par la rencontre d’autres individus ou dans mes rencontres affectives – toujours liées à la rencontre et au partage, à la fascination et/ou acceptation d’une certaine esthétique qui ne m’appartenait pas.
Récemment, mon mode de relation au travail s’est inversé, et j’ai l’impression d’être de plus en plus dans un rapport de type : « être au service de ». Je suis au service de mon travail, et cela me paraît à la fois très intense et incroyablement solitaire comme manière d’envisager la vie. Pourtant je n’ai pas l’impression d’être dans une forme d’aliénation par le travail. Je suis plutôt un agent de mon travail (j’adore le mot agent, si souvent mal utilisé : un agent, c’est « l’être qui agit », dont l’opposé est patient, qui subit l’action).

Dans le train du retour de l’école mes lectures m’ont menées vers  le texte « À propos de la généalogie de l’éthique : un aperçu du travail en cours » (Dits et écrits, Foucault. p.1202), qui commente entre autre l’écriture du souci de soi.
Je crois que cette lecture tombe à point nommée, en tout cas elle raisonne comme étant proche des questions que je me pose sur ce changement d’état. Un extrait, mais tout le texte pose question…

Les Grecs étaient austères parce qu’ils recherchaient à avoir une belle vie et nous, aujourd’hui, nous cherchons à nous réaliser grâce au support de la psychologie.
–  Exactement. Je pense qu’il n’est pas du tout nécessaire de lier les problèmes moraux et le savoir scientifique. Parmi les inventions culturelles de l’humanité, il y tout un trésor de procédures, de techniques, d’idées, de mécanismes qui ne peuvent pas vraiment être réactivés mais qui, au moins, constituent ou aident à constituer une sorte de point de vue qui peut être utile pour analyser et pour transformer ce qui se passe autour de nous aujourd’hui.
Nous n’avons pas à choisir entre notre monde et le monde grec. Mais puisque nous pouvons observer que certains des grands principes de notre morale ont été liés à un moment donné à une esthétique de l’existence, je pense que ce genre d’analyse historique peut être utile. Pendant des siècles, nous avons eu la conviction qu’il y avait entre notre morale, notre morale individuelle, notre vie de tous les jours et les grandes structures politiques, sociales et économiques, des liens analytiques et que nous ne pouvions rien changer, par exemple, dans notre vie sexuelle ou dans notre vie familiale sans mettre en danger notre économie ou notre démocratie. Je crois que nous devons nous débarrasser de l’idée d’un lien analytique et nécessaire entre la morale et les autres structures sociales, économiques ou politiques.

Mais quel genre de morale pouvons-nous élaborer aujourd’hui lorsqu’on sait qu’entre la morale et les autres structures il n’y a que des conjonctions historiques et pas un lien de nécessité ?
– Ce qui m’étonne, c’est le fait que dans notre société l’art est devenu quelque chose qui n’est en rapport qu’avec des objets et non pas les individus ou la vie ; et aussi que l’art est un domaine spécialisé fait par des experts qui sont des artistes. Mais la vie de tout individu ne pourrait-elle pas être une œuvre d’art ? Pourquoi une lampe ou une maison sont-ils des objets d’art et non pas notre vie ?

Bien entendu, ce genre de projet est très commun dans des lieux comme Berkleley où des gens pensent que tout ce qu’ils font – de leur petit déjeuner à la façon dont ils font l’amour ou à la façon dont ils passent une journée – devrait trouver une forme accomplie.
– Mais j’ai peur que, dans la plupart de ces exemples, les gens pensent majoritairement que ce qu’ils font, s’ils vivent comme ils vivent, c’est parce qu’ils connaissent la vérité sur le désir, la vie, la nature, le corps, etc.

Mais si l’on doit se créer soi-même sans le recours à la connaissance et aux lois universelles, en quoi votre conception est-elle différente de l’existentialisme sartrien ?
– Du point de vue théorique, je pense que Sartre écarte l’idée de soi comme quelque chose qui nous est donné, mais grâce à la notion morale d’authenticité, il se replie sur l’idée qu’il faut être soi-même et vraiment soi-même.  À mon avis la seule conséquence pratique et acceptable de ce que Sartre a dit consiste à relier sa découverte théorique à la pratique créatrice et non plus à l’idée d’authenticité. Je pense qu’il n’y a qu’un seul débouché pratique à cette idée du soi qui n’est pas donné d’avance : nous devons faire de nous même une œuvre d’art. Dans ses analyses sur Baudelaire, Flaubert, etc., il est intéressant de voir que Sartre renvoie le travail créateur à un certain rapport à soi – l’auteur à lui-même – qui prend la forme de l’authenticité ou de l’inauthencité. Moi je voudrais dire exactement l’inverse : nous ne devrions pas lier l’activité créatrice d’un individu au rapport qu’il entretien avec lui-même, mais lier ce type de rapport à soi que l’on peut avoir à une activité créatrice.

– Cela fait penser à un cette remarque de Nietzsche dans le Gai Savoir (290), qui dit qu’il faut donner du style à sa vie « au prix d’un patient exercice et d’un travail quotidien ».
Oui. Mon point de vue est plus proche de Nietzsche que de Sartre.

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Étrangement, après la lecture de ce texte, j’ai repensé à cette fascination qu’exerce sur moi le travail de Chris Burden, que j’ai toujours trouvé incroyablement pudique (ce n’est pourtant pas premier qualificatif qui viendrait à l’esprit, j’en conviens), mais je me suis dit que ce qualificatif était assez juste, car la force du travail de Burden c’est de s’éloigner du spectaculaire (alors que son sujet en traite sans arrêt) et de résider sûrement dans cette mise à disposition de son être, dans le fait d’être un agent – jusque dans sa chair – de son travail, dans une grande maîtrise et en même temps dans une extrême fragilité.

Partition, exposition aux Archives départementales de la Dordogne, 15 sept 2010

Du 15 septembre au 5 novembre 2010 – Archives départementales de la Dordogne
Vernissage : Jeudi 16 septembre 2010 à 18h

Sur la Pelouse © Julie Morel 2009-2010

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« Julie Morel a découvert la partothèque des Archives départementales et le fond de partitions d’Elie Dupeyrat, éditeur de musique de bal, implanté à Ribérac à la fin du XIXème siècle. Elle en a sélectionné douze titres tels que Sur la pelouse, Cœur brisé, En revenant de Bourgogne, Étoiles filantes… et en propose une interprétation contemporaine, via l’outil informatique, qui mêlera écritures & notations et production de morceaux électro-pop.
Ainsi, aux Archives départementales, elle sonorise les casiers servant aux utilisateurs à déposer leurs affaires personnelles avant d’entrer en salle de lecture. Aux visiteurs, elle propose la projection d’une vidéo réalisée à partir des signes graphiques de partitions et une application lumineuse : des néons reprenant sept titres dans un caractère proche de l’écriture en braille.
Des œuvres qui réactivent une partie du domaine historique par le biais de programmes informatiques. Nous voilà au cœur de multiples formes de langage où la recherche sonore acquière une dimension plastique. »

Néon & musique & braille

En faisant des recherches (assez peu fructueuses) sur la relation que pourraient entretenir néon et musique – cela me paraissait évident mais à part les signes lumineux représentants bière et guitares électriques, pas grand chose…- je n’ai vu que sur cette image de la pochette d’Arcade Fire, musique qui m’a donc finalement accompagnée aujourd’hui.
> Virgin Mary Highway
Puis je suis passée sur les connexions possibles entre néon et braille et je suis tombée sur Braille Ligado de Detanico & Lain dont le travail me touche toujours beaucoup dans ce qu’il entretient avec l’écriture, la traduction et la transformation quasi systématique qu’ils opèrent entre différents signes langagiers.

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Partition _dispositif

Julie Morel, partition & néons
Test de visuel pour l’installation

C’est ma dernière semaine de résidence aux Archives Départementales de la Dordogne. Je serai de retour en Juin pour un mois environ. J’ai rencontré beaucoup de musiciens classiques de la région qui sont prêts à s’investir sur le projet, notamment Stéphane Séjourné (pianiste), le Centre Culturel de la Visitation et son école de musique ainsi que Dominique Lagarde à l’IMR. Le but de ces collaborations est de retourner à la source de ces partitions avant de continuer à les réinterpréter grâce à l’ordinateur.
Cette dernière semaine, je me suis interrogée sur le principe d’écoute (interactif) de ces morceaux : pour l’exposition aux Archives, je suis restée sur l’idée que les morceaux s’échapperont des casiers de l’entrée des Archives. Mais pour les expositions à venir (Allemagne en septembre, Paris à l’automne) j’avais envie de quelque chose de plus plastique, de modules autonomes qui soient liés à l’écriture, aux titres des morceaux même. Mes recherches m’ont menées à intégrer plus en avant l’écriture braille que je suis en train de mettre en place pour un projet d’édition.

Le dispositif à venir sera donc constitué de 12 mots ou phrases en braille, sous forme de néons accrochés au mur. Ces néons seront «en négatif» (les lettres sont recouvertes de peinture noire sur leur côté apparent, les mots en braille apparaissant donc par contraste sur le mur, formant un halo blanc très lumineux et s’effaçant graduellement).

Chaque néon définit sa propre zone lumineuse. Ces 12 zones lumineuses seront les seules sources d’éclairage dans la salle d’exposition, pour que les visiteurs s’y dirigent naturellement.
Quand un spectateur s’approche à moins d’un mètre d’un néon, un morceau de musique est déclenché (grâce à un capteur de distance situé au mur, prêt du sol). S’il choisit de s’éloigner du néon, le morceau faiblira petit à petit jusqu’à devenir inaudible. Et si deux spectateurs se succèdent devant deux différents néons, il s’opère un fondu-enchaîné entre les deux morceaux correspondants, ce qui permet une transition douce.
L’appartenance d’une musique à chaque néon laisse supposer que l’inscription sur le néon est vraisemblablement le titre du morceau joué (c’est le cas).
De même, on fait le rapprochement entre la «zone d’écoute» du morceau et la zone lumineuse.

Dans les prochaines semaines, je vais faire réaliser un néon test. La suite une fois que j’aurais l’objet sous la main.

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Les casiers à l’entrée des archives

Fidelity revisited, and in progress

fidelity

Je commence à l’envers. Je fais des digressions. Le projet partition est en train de se développer lentement et je cherche une méthodologie de travail. Notamment en ce qui concerne la construction des morceaux d’après les fichiers midi issus des partitions. Je fais des piles : ce son avec celui-ci, celui là, sur cette pile, celui-là, là… Des tas de sons qui iraient ensemble donc, comme on classerait des tissus de couleurs, ou des familles conceptuelles…. j’échantillonne des morceaux que j’aime, d’autres qui ont attirés mon oreille, et j’essaye de comprendre…

Définir une famille sonore m’est difficile avec les partitions trouvées aux Archives Départementales, puisque les fichiers midi générés d’après ces partitions sont sans reliefs, juste une suite de notes monotones et plates. Les morceaux que j’écoute tous les jours et que j’échantillonne pour le moment semblent eux déjà contenir un son, qui peut être détourné et transformé par l’échantillonnage…
Artheist, qui développe en ce moment la partie technique du projet (et qui est plein de bonnes idées sur la conception aussi !) m’a envoyé ce passage de « Microsound » de Curtis Road, qui résume bien la situation :

« Certain composers design a complex strategy as prelude to the realization of a piece. The electronic music composer may spend considerable time in creating the sound materials of the work. Either of these tasks may entail the development of software. Virtually all composers spend time experimenting, playing with material in different combinations. Some of these experiments may result in fragments that are edited or discarded, to be replaced with new fragments. Thus it is inevitable that composers invest time pursuing dead ends, composing fragments that no one else will hear. This backtracking is not necessarily time wasted; it is part of an important feedback loop in which the composer refines the work. »

Thanks Artheist pour la réf. : )

En attendant de pouvoir démêler cette histoire de famille sonore, j’ai expérimenté hier soir avec le morceau « Fidelity » de Régina Spectors…
In progress et à écouter au casque.

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Neige

J’ai commencé la semaine dernière une petite animation qui accompagnera le morceau « Les étoiles filantes » pour l’exposition aux Archives Départementales de la Dordogne. En voici un extrait.

De plus en plus, je commence à voir que le projet partition s’éloigne musicalement de mon intention première. Les partitions ont leur propre vie que l’interprétation et le ré-échantillonnage que je leur fais subir ne peut totalement effacer…
Cette semaine, lors d’une petite séance de travail avec David Bideau sur Live, je me suis aperçue de la manière dont, très rapidement, il arrivait à imprimer sa marque sur le morceau contenu dans la partition originale. N’ayant pas ses connaissance ni sa dextérité musicale, j’expérimente à ma façon.
Cela faisait très longtemps que je n’avais pas produit tout en apprenant un nouveau logiciel. C’est une pratique qui rend humble ! Et je trouve cela, malgré les frustrations, très agréable car je n’ai pas encore de réflexes, pas de bonnes ou mauvaises habitudes, pas d’a priori. Je me retrouve un peu dans la configuration des storms sessions, qui devraient reprendre leur cours cette année !

Conférence 16 déc. 2009 – 16h, Musée des Beaux-arts, Orléans

Conférence « Archivés-chavirés » du 16 décembre 2009 – 16h00
École Supérieure d’Arts et de Design / Auditorium du Musée des Beaux-arts, invitation Sophie Monville.

« Le titre choisi pour la conférence renvoie à un projet récent développé au cours d’une résidence d’artiste, questionnant les processus d’archivage, ainsi qu’à une pratique de l’auto-archivage immédiat proche des hypomnemata de Michel Foucault (L’écriture de soi), et à l’intérêt de l’artiste pour les jeux de mots comme embrayeurs de projets. La conférence abordera également l’idée d’une production artistique qui développe des modes relationnels et narratifs sous diverses formes d’extension. »

orleans

Les titres des autres

Après quelques jours de workshop avec les étudiants de 4/5ème année à l’ESAC de Pau, le blog spécifique à cet atelier que nous avons mis en place commence à prendre forme, et un angle de vision (à la fois individuel et collectif) des choses commence à émerger. Les questions soulevées (l’archive, le rapport méditation-écriture-lecture-action, la reprise, la question du choix, etc.) semblent commencer à produire du sens pour chacun.
Cette phase instable de questionnement commence à être prise en main par l’écriture des articles sur le blog, et l’incertitude de la « feuille blanche » est peu à peu remplacée par le discernement du désir face à ces questions et la construction de percepts. Les articles permettent, à quelques exceptions près, de passer du questionnement à l’appropriation de certains choix puis vers une mise en action.

Pourtant, alors que la construction bat son plein, subsiste des traces de l’inquiétude première : dans les titres.
Spontanés, les titres des articles conservent cette fragilité du début : décompte des  jours, description des étapes où l’on en est – comme pour se rassurer, questions franches (que faire ?), ou échappatoire du sans-titre ou du simple chiffre.
Les titres parlent, ils racontent la genèse de l’atelier.
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3
Jour 3 / la reprise
Qu’est-ce donc ?
Mise en place de scénarios dans les pages mode de la presse féminine
recherches#2
Avancée des travaux
mal-entendu
➽ Premiers essais
SREVNE #2
Régénération
2
1
➽ Two days
Jour 2: Que faire?
Proposition / jour 2
Forever United
SREVNE
Que choisir et que faire ?
recherche #1
chantier
Premier post
et-change
jour 1
Analyse
début du chantier
RÉFLEXION
Mes dossiers
Premier jour
Intro
Workshop Archivage

access_archivages

Workshop à l’école supérieure des arts et de la communication de Pau, dans le cadre du festival Access

L’archive comme création numérique, festival Access, du 7 au 11 décembre 2009

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Workshop de Julie Morel – collectif incident.net. Approche théorique et réalisation collective d’une archive numérique dans le cadre du projet pédagogique de l’école supérieure des arts et de la communication de Pau.

L’art numérique a profondément transformé le principe et les modalités de l’écriture. La trace écrite emprunte des supports polymorphes de plus en plus interactifs. L’utilisation des blogs par les artistes au cœur même du processus de création tend à réduire la distance qui sépare la création de l’archivage. Le blog peut être une archive et une œuvre à la fois, une archive en reconstitution permanente sur laquelle le lecteur peut interagir. L’archive n’est plus figée, elle est une interface, un atelier ouvert, un processus de création. A travers cette évolution, on voit émerger une esthétique de l’auto-archivage fondée sur le réseau, l’interactivité, le flux, le fragment, la pluralité des discours.

 

See you there!

Partition & mémoire

Tu m’écris souvent et je t’en sais gré, car ainsi tu te montres à moi par le seul moyen dont tu disposes. Chaque fois que ta lettre m’arrive, nous voila tout de suite ensemble.
Si nous sommes contents d’avoir les portraits de nos amis absents (…) comme une lettre nous réjouit d’avantage, puisqu’elle apporte des marques vivantes de l’absent, l’empreinte authentique  de sa personne. La trace d’une main amie, imprimée sur les pages, assure ce qu’il y a de plus doux dans la présence : retrouver. »*

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Dans quelques jours, je pars pour Pau, où je vais travailler à un atelier de l’école d’Art, dans le cadre du festival Acces-s. Cet atelier portera sur l’archive, et notamment sur un exercice que je pratique quotidiennement ici : l’auto-archivage immédiat.
Cette question de l’archive, sous la forme spécifique d’hupomnêmata, est récurrente dans mon travail et je suis toujours surprise quand on me propose une résidence, ou de donner une conférence (dans 2 semaines au musée des beaux-art d’Orléans), un workshop sur ce thème, car il me semble que je me trouve à 10000 lieux de l’archive en tant que stockage et de la conservation d’informations.
Pour ma part, ce type d’archive a une durée de vie limitée (comme une œuvre d’art d’ailleurs, notamment numérique – voir la thèse d’Anne Laforêt) et je ne m’intéresse pas à sa conservation ou à rendre compte d’une certaine mémoire de manière didactique (j’envisagerai plutôt la conservation d’une œuvre d’art numérique comme un accompagnement vers sa disparition).
Me balader cet automne dans les quelques 20km de couloir d’Archives à Périgueux a été une expérience étrange… Généralement, on n’accède pas aux archives par leur matérialité (un lecteur se rend rarement dans les étages où elles sont stockées) mais par leur index, par la recherche dans une base de données, cette matérialité reste très présente dans son absence. L’ impression très pesante de ces milliers d’informations disponibles m’a fait me poser une fois de plus la question de cet auto-archivage que je mets en place dans mon blog : pourquoi produire plus d’archives, dans quel but ?

La réponse serait que l’auto-archivage permet une pratique qui se déploie dans le partage. Parfois, il fait œuvre (un peu à la Jonas Mekas finalement) et il en découle une certaine esthétique. Je reste convaincue que ce travail quotidien appartient bien à une sorte de réactivation et non à la conservation classique.

Je relis ce soir le texte « l’écriture de soi », ce très beau texte de Foucault.
« Il ne faudrait pas envisager ces hupomnêmata comme un simple support de mémoire, qu’on pourrait consulter de temps à autre, si l’occasion s’en présentait. Ils ne sont pas destinés à se substituer au souvenir éventuellement défaillant. Ils constituent plutôt un matériel  et un cadre pour des exercices à effectuer fréquemment : lire, relire, méditer, s’entretenir avec soi-même et avec d’autres, etc. Et cela afin de les avoir, selon une expression qui revient souvent, prokheiron, ad manum, in promptu. « Sous la main » donc, pas simplement au sens où on doit pouvoir les utiliser, aussitôt qu’il en est besoin, dans l’action. Il s’agit de se constituer un logos bioéthikos, un équipement de discours secourables, susceptibles – comme le dit Plutarque – d’élever eux-mêmes la voix et de faire taire les passions comme un maître qui apaise le grondement des chiens. Et il faut pour cela qu’ils ne soient pas simplement logés comme une armoire aux souvenirs mais profondément implantés dans l’âme, « fichés en elle » dit Sénèque, et qu’ils fassent ainsi partie de nous-mêmes : bref, que l’âme les fasse non seulement siens, mais soi.
L’écriture des hupomnêmata est un relais dans cette subjectivation du discours. »

misscollante

*Sénèque. Livre 4, lettre 40.

Partition

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Après deux semaines en résidence aux Archives Départementales, voici qu’une ébauche de projet émerge…
Lors d’une réunion, j’ai pu mieux comprendre le fonctionnement des Archives. La répartition des fonds publics, administratifs est majoritaire (les lecteurs viennent surtout consulter les cadastres, ou pour faire des recherches généalogiques) et le reste est constitué de fonds privés, très variés, autant dans leur forme que dans leur contenu, allant des documents historiques sur la guerre de cent ans aux brevets d’inventions (accompagnés de leur prototype) datant d’après-guerre… J’ai été initiée à une recherche de documents, on m’a montré des documents « chavirés » (tombés, en équilibre, endommagés, etc.) et j’ai pu suivre le procédé d’une recherche, bien différente dans la navigation et l’organisation de celles que l’on peut faire en bibliothèque.
Lorsqu’un fond est versé aux Archives, on l’indexe tel quel, il n’y a pas de reclassement alphabétique, ou thématique, pour garder le contexte de départ. On retrouvera par exemple, pour une bibliothèque léguée aux Archives, le classement mis en place par le propriétaire de celle-ci, etc.

Un des fonds privés m’a particulièrement intéressé : il s’agit d’une partithèque regroupant des publications de partitions datant de la fin du XIXème – début XXème. Il s’avère en effet que la Dordogne comptait un très grand nombre de maisons d’édition musicale, et que les originaux sont consultables ici.

Le projet qui commence à prendre forme sera celui de réactiver, en collaboration avec un(e) musicienne, certains morceaux contenus dans ces éditions. Par « réactiver », je n’entends pas simplement rejouer les morceaux choisis à l’identique, mais offrir une interprétation contemporaine de ceux-ci. Comme il s’agit pour la majorité de morceaux de musique populaire, pour la plupart des chansons d’amour, je me dirige vers le pendant contemporain du genre : de la musique pop-électro.

J’aimerai que le mode de consultation de ces « nouveaux » morceaux soient interactifs et inSitu. Qu’ils arrivent à un moment où on ne les a pas forcément choisis. Qu’ils soient un peu comme des bruits, des sons lointains qui hanteraient le bâtiment.
Pour le moment, l’endroit qui me plaît le plus est un espace transitoire entre l’extérieur et l’intérieur : le vestiaire, où l’on se départit de ses sacs et affaires (il est interdit d’entrer dans la salle de lecture avec un sac ou  une veste…). Ce vestiaire possède des casiers à disposition pour les lecteurs, et ils ont à peu près la taille d’enceinte stéréo… Peut-être leur ouverture pourrait déclencher un passage ou une chanson entière…

Pour l’instant, j’ai intitulé le projet « Partition »… J’hésite aussi avec « Départition ».
Comme j’aime beaucoup les mots à double sens, celui-ci me convient très bien. La partition, c’est le document où sont notées les compositions musicales qui permet la lecture de l’ensemble des instruments constituants une pièce. C’est aussi la division d’un ensemble, une séparation.

Archives chavirées

Hier, Sylvie, qui travaille aux archives contemporaines (1945 à nos jours) m’a montré toute une série d’archives chavirées : il s’agit de documents qui arrivent abimés car ils ont été mal stockés, mal entretenus, endommagés par l’humidité, les insectes (notamment le poisson d’argent – joli nom mais beaucoup de dégât), etc.

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Interview

Un entretien réalisé pour l’Agence Culturelle départementale pour le dossier de presse de la résidence et de l’exposition « Archivés/Chavirés » qui aura lieu à partir du 28 septembre aux Archives départementales de la Dordogne.

• Pouvez-vous situer votre démarche dans le monde artistique d’aujourd’hui ?
Rejoignez-vous certains courants artistiques ? Si oui, lesquels ?

C’est assez difficile de se situer : les influences sont multiples. Je me sens à la fois proche d’artistes modernes (Laurence Weiner, On Kawara, Chris Burden, Morellet…) mais aussi de très contemporains, (Cerith Wyn Evans, Etienne Cliquet, Jocelyn Cottencin, les gens d’incident.net, ou encore Antoine Schmitt, Carsten Nicolai…).
Et puis je suis toute aussi influencée par la littérature, de Lewis Carroll à Jacques Roubaud que par le cinéma, la musique pop ou la linguistique.
Je n’ai pas la volonté de rejoindre un courant artistique. Le courant, quand on n’y prend pas garde, ça ne vous emmène pas forcément là où vous voulez, non ?
Mais je reste ouverte à tous les courants et médium, et il se crée naturellement des affinités esthétiques & connexions affectives et d’idées au gré des rencontres.

• Comment définiriez-vous votre travail ?
C’est une dérive constante liée au mot et à la textualité. Pour moi les mots, avant même de produire des images mentales, sont des images en tant que telles (des images, pas des signes).
Le langage, cette chose que j’utilise à chaque minute, reste pour moi un mystère, que je ne suis d’ailleurs pas du tout résolue à percer. Être émerveillée est un état qui me convient et permet de produire beaucoup de choses.
Mon travail observe, par ce biais, mais pas uniquement, le rapport qu’entretien quotidiennement l’homme aux technologies et se construit sur des dispositifs de visible/invisible, lisible/illisible.
Souvent il en résulte un principe de lâcher prise : comme un hors champ, l’acceptation d’une zone d’ombre, d’un territoire caché ou inatteignable physiquement. La fonction & l’issue de ce principe est d’agir comme renoncement et de permettre l’investissement de la part du spectateur dans la construction du récit en cours.

• Comment vous est venue l’envie de travailler sur les technologies numériques ?
Les technologies se sont développées au même moment que ma pratique d’artiste et ma vie quotidienne a été changée par l’apparition de celles-ci. Pendant longtemps, je me suis servie de la technologie comme outil, ce qui rétrospectivement m’apparaît comme un état nécessaire, mais assez léger. Puis un jour un incident assez anecdotique m’a fait prendre conscience que je devais les interroger en tant que système : j’ai cassé un verre en faisant la vaisselle et spontanément j’ai pensé : « Ctrl+Z », le raccourci clavier qui permet de revenir en arrière… Cela a révélé à quel point l’ordinateur m’affectait, jusque dans ma mémoire réflexive. J’ai donc produit une vidéo, « Soumission », et depuis mon travail sonde principalement les notions de traduction, de décalage, d’interstices dans notre lien aux nouvelles technologies.
J’essaye sans cesse d’inventer de nouveaux modes de relations aux autres par le biais des technologies, que ce soit par l’utilisation, la création, le déplacement et la mise en place d’interfaces graphiques, physiques. Ce qui m’intéresse dans la technologie, c’est l’humain.
• Pourquoi portez-vous tant d’intérêt pour la relation quotidienne entre l’homme et la technologie ?
J’y vois deux raisons principales.
Travailler avec la technologie, c’est travailler avec un système de langage (la machine informatique reste cela) qui est intimement lié à l’écrit.
Cette relation homme/techno est constante, profonde et il serait naïf de ne pas constater que depuis la révolution industrielle, d’abord la technique, puis la technologie prolifère à chaque minute et à chaque endroit de notre vie et la modifie, ainsi que la représentation que l’on en a.
Puis il y a aussi l’échec, qui est une constituante & un point commun essentiel entre mon travail (je considère que chaque production n’est qu’une suite d’échecs) et les technologies.
Une machine est souvent un objet dysfonctionnel qui « bug », plante, ou ne marche pas comme on voudrait. Dans ces moments-là, on peut en saisir toute sa dimension poétique, humaine.
• Vous avez déjà effectué plusieurs résidences. Que représente la résidence dans votre travail ?
Une résidence va varier d’un contexte à l’autre. Chaque fois, c’est une rencontre différente, un moment où l’énergie peut être concentrée sur une seule chose. Ce qui est commun à toutes, c’est la possibilité précieuse d’avoir ce temps de travail et de recherche.

• Quel lien tentez-vous d’établir entre le texte et l’image ?
Quand on travaille sur internet, on s’aperçoit vite que le code informatique, le texte donc, est une partie constituante de la structure de l’image. À l’inverse, je vois l’image comme étant une partie constituante de la structure du texte. Une représentation immédiate captée par l’œil avant même que le cerveau n’applique un sens (et une image) au mot lui-même. Il est intéressant d’envisager ce moment comme dénué de toutes interprétations, de tout à priori, comme un moment ouvert à l’attention (C’est par exemple flagrant quand le texte est mis en mouvement, que ce soit par le biais de la vidéo, de l’animation, etc.).
Et puis, dans un deuxième temps, le langage est un moyen beaucoup plus direct de passer un message. D’après Weiner, le langage en art se rapporte au matériau, il est entièrement matériel, mais n’en possède pas la lourdeur. Sous sa forme textuelle, je trouve le langage aussi moins encombrant, plus proche de l’idée, avec cette ambiguïté d’être à la fois image et texte.


• On remarque votre implication au sein du collectif incident.net depuis 1998. Cette collaboration a-t-elle une « incidence » sur vos recherches personnelles ?

Oui, beaucoup. Un des points importants et spécifiques de l’art numérique – notamment du travail sur internet – est l’intelligence collective (qui me semblait alors absent du milieu de l’art contemporain). Cette découverte, je l’ai faite avec les membres du collectif incident.net.

• Vous avez réalisé une installation intitulée « Sweet Dream » en 2008/2009 qui a généré une production de dessins. Quelle relation établissez-vous entre les technologies numériques et le dessin ?
Aucune à priori. Mais ils cohabitent très bien : )
La spécificité de « Sweet Dream » est de se développer en deux endroits géographiques distincts – une galerie, un centre d’art ou autre lieu public et ma chambre chez moi – et sur un principe déceptif, puisque l’un de ces lieux n’est pas accessible et que l’on a aucune image ni retour de celui-ci. Ce qui me semble important c’est que ces dessins, en se rapprochant des codes des kakémonos traditionnels, ont ce même rôle d’être des objets projetant le spectateur dans un espace inatteignable mais qui porte à la réflexion.

• Vous débutez votre séjour aux Archives départementales de la Dordogne. Comment ressentez-vous les lieux ? Sur quelles pistes de travail pensez-vous vous diriger ?
C’est toujours passionnant et difficile de se retrouver catapulté, de découvrir un lieu avec son histoire, ses règles, ses enjeux. J’oscille toujours entre l’envie de ne pas déranger et celle de prendre le lieu à bras le corps et comme un terrain de jeux.
Les Archives Départementales sont un endroit ne renfermant presque que du texte, j’aimerais pouvoir révéler quelques images cachées derrière ces textes.
Avant d’éprouver le lieu, je me suis attachée à son nom : Les Archives.
Archives (archivés) est un mot lourd de sens, de significations, et j’ai eu comme souvent envie de prendre la tangente, de bifurquer, de lui « tordre le cou » et d’activer autre chose, quelque chose qui n’est pas immédiat ou évident, mais néanmoins présent en son sein. Je suis donc partie sur l’unique anagramme du mot « archives » qui est « chavirés ».
Il m’a semblé qu’il y a quelque chose de l’ordre du naufrage dans une telle entreprise. Comment les documents stockés et triés s’échouent-ils là ? D’où viennent-ils ? Quelle est leur fonction, le mode de sélection, quels en sont les utilisateurs, etc.
Encore une fois, c’est le fait d’échouer, l’échec comme ouverture potentielle pour construire autre chose qui me vient à l’esprit.

• Qu’allez vous présenter au public lors de l’inauguration de votre résidence aux Archives Départementales de la Dordogne ?
C’est une sorte d’invitation au voyage dans mes archives de travail. Il s’agit de différents travaux déjà produits que je tente de connecter au double « archivés/chavirés », et qui vont se trouver revus ou étendus pour le lieu. Ces pièces formeront des entrées possibles vers mon univers.
C’est la première fois que je fais une exposition où presque toutes les pièces présentées sont déjà produites ; une partie de ce premier mois de résidence sera donc consacrée à les expérimenter dans le lieu (qui à première vue possède déjà un nombre étonnant de signes graphiques) et de les réactiver dans ce contexte et ces contraintes. Mais plutôt que de me cantonner à la salle d’exposition, territoire dédié et identifié comme tel, je préfère investir les lieux fréquentés par les utilisateurs : la salle de lecture, le hall, etc.
Je voudrais quand même tenter durant ce mois un nouveau projet, qui prendrait la forme d’une partie de bataille navale sur les murs de la salle de lecture, qui s’y prête parfaitement. Un projet évolutif sur une semaine, nommée « touchés/coulés », dont les traces seraient présentes visuellement pendant la durée de l’exposition.

Archives

Je suis en résidence aux Archives départementales de la Dordogne, dans le cadre des Résidences de l‘Art en Dordogne, du 1er au 29 septembre. J’y retournerai en février puis en mai, pour développer un projet sur le naufrage.
Une première exposition, où je présenterai une dizaine de pièces déjà réalisées, mais réactivées pour le lieu, s’y tiendra à partir du 28 septembre 09.

See you there!

Archivés, chavirés, échoués, fantômes

Je pourrais passer des journées entières dans le dictionnaire (c’est d’ailleurs ce que j’ai fait aujourd’hui !). Et j’en profite pour faire un lien avec l’une des conférences de Erin McKean (au TED) que j’aime particulièrement pour son enthousiasme…

Donc aujourd’hui, j’étais en quête de réponses. Des réponses sur le vocabulaire et par extensions les idées que je vais manier pour ma résidence et l’exposition aux archives.
Ce qui est parfait avec les dictionnaires, c’est que l’on se retrouve toujours avec des réponses dont on n’avait pas posé les questions…
…Quelques mots sur lesquels j’ai fait des recherches.

> Archives vient du grec arkahaia/arkhê (commencement, pouvoir). C’est assez étonnant pour un mot qui désigne à la fois l’ensemble des documents et le bâtiment où ils sont stockés, conservés, en fin de vie, prend sa source dans « commencement ».

> Chavirés est un mot provençal (cap virar) qui veut dire tourner la tête (en bas). Bien sur il y a le double sens que j’aime beaucoup : à la fois se retourner sur soi-même quand il s’agit d’un navire, mais aussi, pour une personne,  être fortement émue par quelque chose…

J’ai aussi appris à cette occasion que les mots échouer et échec n’avaient pas la même racine, contrairement à ce que je pensais (échec viens du persan : le roi est mort).
Échouer (et s’échouer) a un sens beaucoup moins négatif qu’il n’y paraît, mais son origine est obscure : soit il vient de échoir (= être dévolu par le sors ou le hasard) et choir, avec pour résultat une certaine immobilité, soit il vient de « escoudre » (= secouer). Cette dichotomie me fait penser au sort des divers documents qui arrivent hasardeusement aux archives : à la fois conservés, immobiles, et sans arrêt déterrés, consultés.

Pendant ma visite aux archives, j’ai été impressionné de voir à quel point la définition du mot archives est large : il ne s’agit pas uniquement de papier. Toutes sortes d’objets entrent dans la catégorie « archives », j’y ai par exemple vu une quantité de plaques d’imprimerie plus passionnantes les unes que les autres.
On m’a aussi parlé du vocabulaire spécifique à ce domaine, et le mot qui m’a le plus marqué est le « fantôme », ce papier que l’on laisse en place d’un document qui est monté en salle de lecture… Les archives, un vaisseau fantôme ?
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S’échouer

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Me voici de retour de Périgueux, où j’ai passé la journée d’hier pour mettre en place le planning et l’organisation de ma résidence avec l’agence culturelle départementale. J’ai visité les archives, où je vais en partie travailler, et où se tiendra une première exposition en octobre (il y en aura une autre en juin 2010, à la fin du programme de résidence qui durera 3 mois. Sept.09/avril2010/juin2010).

La date de l’exposition aux archives départementale étant fixée, on m’a demandé de faire une proposition pour la semaine prochaine (!?). Elle a pour but de présenter mon travail, pas forcément produire de nouvelles pièces. Mais en voyant l’espace d’exposition, une salle immense – mur blanc, parquet – un white cube dédié, j’ai quand même décidé que ce serait surement mieux d’intervenir dans les espaces fonctionnels plutôt que d’exposer dans une salle à part… Et donc de produire quelque chose de nouveau en fonction du contexte.

J’ai listé ces endroits :
– L’entrée (une première entrée vide avec la machine à café squatté par les lycéens)
– Le hall d’entrée avec la réception, avec son panneau blanc (projection?)
– La salle de lecture (les écrans de veille des ordinateurs, les lampes?)
– Les escaliers
– Les sous-sols
– les bureaux de l’administration (mezzanine).

Le lieu des Archives est passionnant : pour le moment, parce que je ne l’ai pas pratiqué plus que ça, plus par l’activité humaine qu’il génère, les protocoles et les déplacements mis en place, sa masse, etc., que par les kilomètres d’informations qu’il renferme réellement.

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J’ai aussi visité le lieu de résidence, une petite villa étrange et calme sur une colline de la ville, dont le chemin privé est bordé d’un panneau digne de romans policiers. Je le trouve pas mal d’ailleurs ce panneau, il me fait penser que beaucoup de gens vont aux archives pour creuser dans ce qui est enfoui, qu’ils réalisent des autopsies administratives en quelques sortes.

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J’ai appris la semaine dernière que j’étais lauréate pour la « résidence de l’art en Dordogne » 2009-2010, aux Archives départementales de la Dordogne !
Je pars donc la semaine prochaine à Périgueux pour finaliser la convention qui me permettra, pendant 3 mois l’année prochaine, de travailler aux archives départementales pour produire une série de travaux, notamment sur le web (mais j’espère bien pouvoir ramifier et créer d’autres extensions via d’autres médiums).
J’aime bien ce temps d’a-préhension qui précède le départ d’un projet, où les choses vont assez lentement et où les idées sont encore ouvertes et floues, ce moment qui permet de fantasmer un projet, un lieu, un mode travail. Un temps assez subjectif aussi, où la réalité n’a pas encore appliquée son principe. Et donc aujourd’hui, j’ai déjà décidé d’une direction que prendrait le travail en lui donnant pour titre la seule anagramme du mot archives.
Me voila donc partie pour travailler sur le naufrage.

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